« Les racines qui conduisent à la lutte des classes existent encore » affirme Vincent Tiberj

Vincent Tiberj, professeur de sociologie à Sciences Po Bordeaux et auteur de l’essai
Vincent Tiberj, professeur de sociologie à Sciences Po Bordeaux et auteur de l’essai "Droitisation française. Mythes et réalités" (PUF). © Hugues Bretheau Sam / Université de Bordeaux

L’idée d’une France de plus en plus conservatrice paraît largement acceptée, surtout depuis les succès électoraux du Rassemblement National. Pourtant, dans La droitisation française, mythe et réalités (PUF), Vincent Tiberj propose une analyse différente : il n’y aurait pas du tout de « droitisation par en bas », c’est-à-dire une droitisation des citoyens, mais plutôt une « droitisation par en haut », une droitisation de la parole politique et médiatique.

Entretien avec Didier Caramalho dans l’ALFA 10/13 du 15 octobre 2024 :

 

Vincent Tiberj soutient que les Français sont bien plus progressistes qu’on ne le croit, malgré un discours dominant qui met en avant un retour aux valeurs traditionnelles. Dans La droitisation française, mythe et réalités (publié aux PUF), le sociologue montre que la société française est de plus en plus ouverte sur les questions sociales et culturelles, loin de l’image d’un pays replié sur des valeurs conservatrices.

Le sentiment de droitisation provient, selon Vincent Tiberj, d’un décalage entre les préoccupations des citoyens et l’offre politique, ainsi que du rôle de certains médias qui amplifient les discours réactionnaires. Des « acteurs politiques et médiatiques » mettent effectivement en avant « certaines questions, certains sujets » – comme « le grand remplacement, par exemple » ou la dette publique – qui ne reflètent pas les priorités des citoyens ; ce sont « de purs procédés rhétoriques » qui faussent l’opinion publique.

Vincent Tiberj | La droitisation française. Mythe et réalités. PUF, 144 p., 15€
Vincent Tiberj | La droitisation française. Mythe et réalités. PUF, 144 p., 15€

Ce phénomène crée une grande démission citoyenne : de plus en plus de Français se désintéressent du vote. Cette abstention croissante fausse la représentation électorale et donne l’impression que le pays est plus conservateur qu’il ne l’est en réalité.

Vincent Tiberj souligne également « la droitisation de la parole médiatique qui pèse » dans cette dynamique. Des chaînes, comme CNews, donnent une large place à des discours réactionnaires – renforçant l’idée d’un retour en arrière sur les valeurs sociales – et jouent un rôle clé dans la diffusion de discours polarisants. En réalité, les valeurs progressistes sont toujours présentes, mais sont donc obscurcies par les récits médiatiques dominants.

Alors, donnons aujourd’hui la parole à Vincent Tiberj dans l’ALFA 10/13 pour rappeler cette thèse importante !

Didier Caramalho

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